Ce que le Fairground Festival nous apprend sur « les jeunesses tunisiennes »

Ce que le Fairground Festival nous apprend sur « les jeunesses tunisiennes »

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Il y a plusieurs manières décrire sur un festival : en informant avec simplicité en quoi il consiste, en mettant en valeur laxe artistique ou bien en le plaçant dans le cœur dun contexte politique et social. En vue de la prouesse du Fairground Festival hier soir et de lampleur du phénomène, il est sans doute une occasion pour nous dapprendre des choses sur la jeunesse plurielle tunisienne.

 

Fairground Festival a vu les choses en grand pour cette édition. En entrant à l’Ecovillage qui se trouve à Sidi Bou Ali, le ton est donné. Le village est entouré de champs d’oliviers, coupé du monde. En y pénétrant, on découvre un petit monde autonome, l’argent y est remplacé par des jetons, l’eau est remplacée par la bière, et un stand se distingue : celui dédié à charger les téléphones. Une jeunesse connectée même en mode farniente, la mixité est de mise, les corps sont libérés, beaux et bronzés. Ici, à l’Ecovillage une seule loi prime, celle du bien-être et de la liberté. Les couples s’embrassent, les verres ne désemplissent pas, sous le regard bienveillant d’un cheval géant, les jeunes respirent. 

  

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Credit photo : Rym Haddad

   

Bien que pour certains la fête reste synonyme de défoulement, elle est pourtant bien plus complexe ! qu’est-ce que faire la fête en pleine crise financière et sociale ?

 

Il n’y a pas si longtemps en Ukraine suite à la crise avec la Russie, la jeunesse a doublé de boulimie fêtarde. En Tunisie, nous assistons au même phénomène, la fête ne se résume plus au défoulement, mais à une forme de résistance (ni programmée ni organisée) au désenchantement et aux restrictions morales subies dans la société. Elle s’incarne d’abord dans le style vestimentaire, shorts courts, tatouages, coiffures de magazines, hommes et femmes se donnent à des extravagances presque impossibles au quotidien, mais à l’Ecovillage la mode s’impose, la mode d’une époque. La résistance est aussi dans la jeunesse des organisateurs, qui défendent une manière de faire nouvelle, relevant les défis économiques et en surprenant leur monde en arrivant à créer une capitale de la fête décentralisée, misant sur des fêtards venus de Sousse, de Monastir, de Sfax, de Tunis et imposant ainsi l’idée qu’un « hors Tunis » est possible. Le « sold out » du Fairground Festival ferait rougir plus d’un festival électro à Tunis. 

 

Un moment mémorable, la nuit tombée, vers les coups de minuit, résonnait « Come together » des Beatles, remixé, et sur la piste recouverte de festivaliers, les mains se sont levées au ciel sur ces paroles des sixties :

 

 

 

Come together, right now,

Don't come tomorrow, don't come alone,

Come together, right now, over me,

All that I can tell you

Is you gotta be free.

Rassemblez-vous, maintenant,

N'attendez pas demain, ne venez pas seul,

Rassemblez-vous, maintenant, autour de moi,

Tout ce que je peux vous dire,

C'est que vous devez être libres.

 

 

 

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Crédit Photo : Rym Haddad
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Credit photo : Rym Haddad

 

 

Ils sont fils de professeurs, d’ouvriers ou de médecins, ils ont les accents de toutes les régions, ils ont des convictions et des parcours différents, pourtant, ils coexistent loin des batailles habituelles, des contraintes du quotidien, ils respirent profondément la musique, la joie, l’amour. Les mauvaises langues diront qu’ils ne sont au contraire que le reflet d’une jeunesse passive, qui fume et danse sous ecsta. Que répondre à cela, à part que le temps fera son œuvre et prouvera que LA jeunesse n’existe pas, qu’elle est plurielle, que ces jeunesses refusent l’avenir qu’on lui trace, et que même si certains de ces festivaliers deviennent des fachos à quarante ans passés, il y aura toujours au fond d’eux, un jeune homme qui dansait dans un paradis appelé « écovillage ». 

 

Le Fairground n’est pas un festival à encourager, il est réussi, mais il doit être préservé. C’est un événement qui a su combiner la qualité artistique et une manière d’être, de vivre, et de penser. Voici donc pour la première journée... to be continued.

 

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Credit Photo : Rym Haddad